Mike Shaw est un trentenaire, british jusqu’au bout des ongles et comptable de son état, métier qu’il n’a pas choisi puisqu’il l’exerce en hommage à son père qui exerçait également ce métier mais devenu SDF à la gare de Waterloo suite à son divorce et qui s’est finalement jeté sous un train….
Un métier qui l’ennui, une petite amie sans charme ni saveur, bref Mike est un homme blasé et sans avenir à la vie insipide.
Un soir, dans un pub londonien, il fait la rencontre de Laura, une originale qui vit dans les beaux quartiers avec son richissime papa, Harry, avec qui elle entretient une relation plus qu’ambigüe. Harry est lui aussi un original. Passionné par Baudelaire, il entretient une vie décadente dans la droite lignée de son idole.
Ces deux rencontres vont bouleverser la vie de Mike et lui faire perdre tout sens commun. Il va se faire manipuler par Laura qui va lui demander de tuer ce père dérangeant…
Ken Bruen dresse ici le portrait d’une certaine Angleterre post-Thatcherienne. Dans ce cadre décadent aussi bien politiquement qu’au niveau de ses mœurs, on assiste à la déchéance de Mike Shaw qui va passer en l’espace de quelques semaines du statut de petit comptable inoffensif à celui de meurtrier dépourvu de sens moral.
Quant à Baudelaire, il est présent tout au long de ce polar mais en toute discrétion…
Mon avis : Ce livre est ma première rencontre avec Ken Bruen et il m’a totalement convaincu. Il s’agit d’un excellent polar qui se lit très vite et avec beaucoup de plaisir. Il faut dire que j’adore les anti-héros et Mike Shaw incarne à merveille ce rôle de looser. Les références à Baudelaire apportent une petite touche poétique à ce polar d’une noirceur infernale.
Ma note : ****
Pour vous mettre l'eau à la bouche, voici la note de l'auteur en introduction du livre :
Lorsque j'ai écrit En effeuillant Baudelaire, au début des années 1990, Londres se remettait à peine des années Thatcher, l'ombre de la Dame de Fer planait encore sur la ville. S'il faut trouver un terme pour caractériser l'esprit qui dominait alors, "paranoïa" me paraît le mieux approprié. Les hommes d'argent, en particulier, vivaient dans la peur, encore étourdis par e crash des années 1980. Si on y ajoute l'effet de certaines drogues, on peut imaginer leur état de nervosité. Le prix de la cocaïne atteignait des sommet et l'argent... eh bien, l'argent était le moteur principal, comme dans la plupart des rencontres.
La criminalité en col blanc était le sujet des débats passionnés de certains dîners en ville. J'ai voulu explorer les réactions des gens avec un métier "sans risques", qui se seraient laissés séduire par les trois sirènes habituelles que sont : l'argent, le sexe, le pouvoir.
Prendre un comptable, par exemple, l'attirer dans les venelles du crime et observer sa réaction. Je voulais mesurer comment auraient résisté, à cette mise en cause de leur sécurité et de leur stabilité, les plus "passe muraille" de nos concitoyens. En ajoutant Baudelaire aux mailles du filet, on faisait pencher le plateau de la balance... il n'existe guère d'animaux plus dangereux qu'un anglais déstabilisé."
Tout est dit !
En effeuillant Baudelaire, de Ken Bruen
Chez Points, Roman noir
216 pages